Sonate céleste

D’un noir profond, trônant au centre de la salle,
Se faisant tantôt basse et tantôt soprano,
Inondant l’opéra de sa voix magistrale,
Comme figeant le temps, chante le piano.

D’un mélodique élan, il transporte les âmes
Qui boivent volontiers ses langoureux récits,
Plus émouvants que maints contes, mythes et drames ;
Les mots sont des accords les reflets imprécis.

Une altière envolée insuffle à la ballade
Un vent impétueux de flocons argentés,
Défilant dans les cieux en fluide cascade
Comme suivant, chacun, leurs propres volontés.

Le vigoureux torrent devient calme rivière,
Coulant paisiblement en mode éolien ;
Mélancolique plainte et pieuse prière
S’unissent toutes deux d’un timide lien.

Tel un astre brillant, la sereine berceuse
Dévoile chastement sa robe de cristal ;
Un grave chœur surgit, sonore Bételgeuse,
Annonçant du morceau le chapitre final.

Dans un rythme effréné s’enchaînent les arpèges,
Météores filants libres de tout substrat,
Feux follets spiralant en furieux manèges
Consumant l’univers dans un dernier éclat.