Rêve d'été
Je repense aux chemins de la vieille campagne
Où je vécus, enfant, dans les fleurs et les champs.
Je gambadais gaiement, rêvant de la montagne,
Caressant les moutons aux sabots trébuchants.
Siégeant dans la lumière, un majestueux chêne
Daignait me protéger d’un zénith esseulé ;
Son toit d’écorce brune et son ombre sereine
Berçaient mon doux sommeil d’angoisse immaculé.
À deux pas, entouré de buissons d’aubépine,
Ruisselait un cours d’eau galamment parfumé
Où parfois je voyais se baigner une ondine
Dont le sourire, au premier jour, m’avait charmé.
Cette nymphe sublime, image d’Aphrodite,
Emplissait l’univers de mes rêveuses nuits ;
Dans mes bras enlacée, elle riait, séduite,
Et je vainquais ainsi mille amants éconduits.
Dans ce monde sculpté d’une onirique argile,
J’étais l’objet béni de son affection ;
Est-il songe plus beau que l’innocente idylle
D’un cœur se découvrant une inclination ?
Je me noyais entier dans son noble visage
Jusqu’à ce qu’elle dût aux anges retourner ;
Alors elle ascendait, emportant ce mirage,
Après avoir empreint mes lèvres d’un baiser.
Inéluctablement, une brume légère
S’abattait sur la terre en voile de satin ;
Traversant le linceul, une douce lumière
M’annonçait la cruelle approche du matin.
Muet, j’ouvrais les yeux, libérant une larme
Dont la cause échappait à mon entendement.
Je me levais, confus, vers cette aurore parme
Où je cherchais l’éclat d’un tendre sentiment.
Le rideau de soleil pansait ma nostalgie,
Ramenant mon esprit à la réalité.
Une timide brise éteignait ma bougie
Et devant moi naissait un nouveau jour d’été.