Le Domaine du Satyre
La mousse recouvre les souches
Qui jonchent la vierge forêt.
Derrière un grand cèdre, un furet
Pourchasse des lièvres farouches.
Les fleurs aux couleurs éclatantes
M’enivrent de leurs doux parfums :
Autour de moi, des séraphins
Volent de leurs ailes seyantes.
Une grotte inconnue m’attire ;
Quels trésors peut-elle cacher ?
Je pénètre le cœur léger
Dans le domaine du satyre.
L’obscurité m’enveloppe ;
J’avance d’un pas prudent
Quand m’assomme un cri strident
D’une bête nyctalope.
L’animal me dévisage ;
Serai-je donc son dîner ?
Ciel ! Si je dois opiner,
C’est un bien mauvais présage !
Je brandis ma clarinette ;
Voici un air chantonnant !
L’artifice est convaincant ;
J’entame une autre musette.
L’hôte de la caverne apprécie ma musique ;
J’en joue ad libitum, reculant doucement.
La lumière du jour ! Quel destin fort clément :
Je vivrai donc encor, sauvé par le classique.
J’émerge indemne de la profonde caverne ;
Le prédateur obscur daigne me laisser fuir.
Dans l’ombre, la lueur de ses yeux couleur cuir
Me fixent tel un gueux que son seigneur gouverne.
Je prends ainsi congé du ténébreux refuge,
M’écroulant sur le sol, confus mais bien vivant.
Ami, si un jour tu te retrouves devant
La Mort, un instrument est un bon subterfuge.