Ce Dernier Mensonge
Je pense, nostalgique, à mes doux ans d’école
Diligemment passés à jouer aux ballons
Loin de cette fatigue et de ces combats longs
Contre ma tension qui vers le ciel décolle.
Ce passé ressassé, sans sagesse sensible,
À de divins loisirs lestement consacré
M’invite languissant à mon balcon sacré
D’où mon regard se pose à l’horizon, sans cible.
Que ne puis-je à nouveau m’amuser à des fêtes
Où le vin coule à flots, nous saoûlant calmement ?
Ce vœu certes pieux et amical me ment ;
Ma vie ne fut qu’échecs, débâcles et défaites.
Je marche seul et las en traînant la semelle,
Le front caressé par de larges jets pluvieux,
Les yeux perdus, cherchant des repères plus vieux,
Disparus de ce que la mort au temps se mêle.
Un vieillard passe dont le ballant se veut lisse,
Sa démarche évoquant un fiévreux prévenu
Qui, gracié, fût dans ce sombre pré venu
Attendre qu’un marais sans bruit l’ensevelisse.
Le fragile ancien, dans ses errements, songe
À sa seconde vie, au plaisir qui l’attend !
L’illusion se rompt et, d’un soupir latent,
Je m’écroule épuisé dans ce dernier mensonge.