Mozart - Don Giovanni

Avant-hier, je suis allé voir Don Giovanni au Théâtre des Champs-Élysées : rien de tel qu’un opéra pour entamer une nouvelle saison, dirais-je, fussé-je un habitué. Cet opéra s’inspire entre autres du fameux Dom Juan de Molière, reprenant notamment sa fin en apothéose avec la statue de pierre du commandeur.

Je n’ai en vérité pas grand-chose à en dire, si ce n’est que la mise en scène a fait preuve de beaucoup d’ingénuité et de liberté : par exemple, ce n’est pas tous les jours que vous verrez du poulet KFC sur la scène d’un opéra ! Deborah Cohen a produit un travail remarquable : entre l’utilisation du matériel des musiciens (chaises et pupitres), l’inclusion de l’orchestre dans la pièce et les chorégraphies des acteurs, la représentation a sublimé ce caractère enfantin et farceur propre aux pièces de Mozart.

En ce qui concerne la musique, j’ai été assez surpris de ce qu’il n’y ait pas eu de leitmotiv qui revienne tout au long de l’opéra : peut-être me suis-je trop habitué à Verdi ? L’air de la Forza del destino était à juste titre trop beau pour ne pas être utilisé plusieurs fois. Je suis fort marri de ne pas pouvoir vous parler d’un air qui m’eût marqué plus que les autres. Néanmoins, à partir de l’apparition de la statue du commandeur au milieu du second acte, la montée en tension graduelle m’a particulièrement impressionné. Quel final incroyable en feu d’artifice ; j’en ai eu des frissons !

J’ai beaucoup aimé David Ireland en Leporello : il a interprété le faire-valoir, benêt mais honnête, avec brio. Toutefois, le personnage le plus intéressant de la pièce est Donna Elvira. Cette pauvre fille, menée en bateau par Don Giovanni, éprouve pour lui un mélange explosif d’amour et de haine. Son monologue, juste après que Don Ottavio eut déclaré Don Giovanni coupable du meutre du commandeur, est saisissant.

Elle m’a trahie, cette âme ingrate, ingrate :
Elle m’a rendu malheureuse, ô Dieu, malheureuse
M’a rendu malheureuse, malheureuse, ô Dieu.
Mais trahie, abandonnée, j’ai encore pitié de lui,
Pitié, j’ai encore pitié de lui, pitié de lui.

Aussi, j’ai bien aimé cette réplique de la statue du commandeur.

Il ne se nourrit pas de nourritures terrestres
celui qui se nourrit de nourritures célestes.

Sur ce, je vais vous laisser avec l’ouverture de Don Giovanni. Pour l’anecdote, ce génie de Mozart l’a composée la veille de l’ouverture alors qu’on l’avait cadenassé dans un cabinet pour l’empêcher de procrastiner. J’aimerais bien voir ce que cela donnerait sur Hans Zimmer : peut-être aura-t-on encore mieux que la bande-son d’Interstellar ?